Comment le digital révolutionne la formation

Philippe DellièreConsultant, coach et formateur

Admin ADENIT

Comment le digital révolutionne la formation 

Le digital ouvre un large accès aux expertises et multiplie les possibilités pédagogiques. Il est désormais possible de créer de véritables écosystèmes pédagogiques autour des apprenants : des "streams" de formation dans la durée, multimédia, économes en moyens, sur mesure, en lien avec le business. Mais pour cela, il faut repenser l'acte de formation et le rôle des formateurs. Et être créatif pour utiliser toutes les potentialités du digital et du social.

Je ne sais si vous le vivez, mais les habitudes pour s'informer et se former changent à vitesse grand V. D'abord, premier réflexe, quand on ne sait pas quelque chose ou qu'on rencontre une difficulté nouvelle, on tape une phrase dans la barre google pour savoir si quelqu'un n'a pas déjà réfléchi au sujet. Puis on jette un oeil sur l'article wikipedia qui correspond. Dans 90 % des cas on a une réponse qui suffit amplement pour résoudre la difficulté. Si on a un peu de temps on poursuit sur youtube pour voir si une ou deux vidéos d'experts ne sont pas disponibles.

Les pratiques pour s'informer et se former changent radicalement

Ceux qui sont un peu plus organisés ou versés dans le digital ont mis une alerte google pour que rien ne leur échappe sur leurs sujets de prédilection (j'en ai par exemple une sur "ingénierie pédagogique" et une autre sur "digital learning"...). On s'est abonné aux TED conférences et à deux ou trois MOOC. On suit sur twitter ou linkedin des influenceurs de renom. Et pour bien faire, et parce que ça fait aussi du bien de se sentir un expert entre experts, on est inscrit sur quelques forums et on se fend d'un post de temps en temps, voire on tient un blog si on a un peu le culte de la personnalité !

Parfois on s'offre un webinar, un meet-up, voire une journée d'atelier, pourvu qu'elle soit s'il vous plaît expériencielle, parce qu'on va pas se déplacer pour un conférencier qui crachouille interminablement son powerpoint dans un micro.

Les entreprises auront-elles encore un rôle dans la formation de leurs employés ?

Et l'entreprise dans tout ça me direz-vous ? Attend-on encore quelque chose d'elle pour se former ? Eh bien, elle va devoir se mettre à manager ces flux pour obtenir un peu de cohérence... D'ici à ce que la fonction de Responsable Formation se rapproche de la logistique !

Car l'explosion du digital allié aux changements des habitudes permet désormais de penser la formation d'une manière totalement nouvelle. Plutôt comme un abonnement à des "streams pédagogiques" continus et sur-mesure, un accès à des éco-systèmes apprenants qui mélangent allègrement contenus en ligne, et moments forts, collectifs et expérienciels . C'est un peu comme assembler des cubes, avec beaucoup d'itérations, de retours sur expérience, de coaching, co-coaching, reverse-coaching ! afin de créer les redondances, feed-backs, confrontations, décalages et recadrages qui sont, on le sait bien, les véritables leviers des montées en compétence. Vous voyez le tableau ?

Ce qui fera la différence, ce sera - 1 : la qualité des contenus, et -2 : la pertinence de l'orchestration des leviers.

La qualité des contenus : la barre est mise de plus en plus haut. On a maintenant accès aux meilleurs de leur domaine, en direct de Stanford ou de l'université du Maryland, si nécessaire en VO sous-titrée. Il faudra donc se battre pour avoir ces experts de renom pour ses collaborateurs. Dans tous les cas, ce ne seront plus les formateurs qui transmettront l'expertise.

L'orchestration des leviers : les ingénieurs pédagogiques ont de beaux jours devant eux, en particulier ceux qui sauront monter la mayonnaise avec la juste dose de présentiel et de distanciel, d'individuel, de collaboratif et de social, d'expérienciel et d'accompagnement... Ceux qui sauront agencer avec pertinence les différents leviers pour créer des dynamiques apprenantes en économie de moyens, ancrées dans le business des apprenants.

Les formateurs seront plutôt des coachs de carrière.

Des gens qui aideront à faire exister les individus dans l'abondance des contenus et des technos, stimuleront, guideront et accompagneront les professionnels dans leur performance opérationnelle comme dans leur développement et leur satisfaction au travail. 

Et le big data dans tout ça ? Eh oui, comment ne pas parler du big data quand on parle du digital ?

Dans cette histoire, le big data remplace... la feuille d'émargement.

Je m'explique. Au jour d'aujourd'hui et jusqu'à ce que l'un d'entre vous me prouve le contraire, la signature de la feuille d'émargement vaut pour l'acquisition des compétences. Si l'entreprise s'en donne la peine, elle pourra vérifier les montées en compétence au travers des données issues des résultats opérationnels et des déroulés de carrière.

Désormais et plus que jamais, la performance des entreprises réside dans leur capacité à mettre leurs collaborateurs dans une dynamique permanente de professionnalisation et à en mesurer les résultats.  La digitalisation permet de répondre à ce défi.


Philippe Dellière

Consultant, coach et formateur